Bonjour tout le monde,
Il y a quelques jours, je suis tombé sur une vidéo qui m’a interpellé.
Alors, cette piste cyclable est-elle vraiment inutile ? Comment un sujet de ce type a-t-il pu voir le jour et quelles solutions seraient possibles ici pour améliorer la circulation ? Je me suis donc rendu sur place et j’ai mené ma petite enquête pour vous partager ce que j’ai appris.
Commençons avec ce premier extrait de TF1. On peut y voir Amine Saha, il est présenté comme membre des “usagers de la voie publique”. J’ai commencé par creuser là car le sujet n’en parle pas
PÉTITION
Et j’ai pu retrouver sur ses différents réseaux sociaux une pétition qu’il a soutenue par ce groupe des usagers de la voie public sur les pour la suspension des pistes cyclables anti-écologiques et anti-démocratique.
Sans autre argument sur la page que le fait que 48% des Français estiment que leur ville n’est pas adaptée aux vélos.
Je ne sais pas ce que ce chiffre tend à prouver ni d’où il vient. Après une recherche, j’ai quand même trouvé une information reliant « 48% » et « vélo ». C’est un article de Libé qui indique que « le nombre de Français qui se déplacent régulièrement à vélo a augmenté de 48% en cinq ans ».
Mais je doute que c’est ce que cette pétition souhaite mettre en avant.
En continuant mes recherches sur les solutions que pourrait proposer cette pétition, je suis tombé sur ce commentaire d’un certain Aly D, le premier déposé sur cette pétition :
« Ces pistes cyclables constituent un véritable calvaire pour l’ensemble des usagers de la voie publique. Prendre ce genre de décisions sans aucune concertation avec les habitants est extrêmement grave. Je suis contre leur installation punitive et je souhaite que le département revoit sa copie par une véritable consultation de la population et des usagers de la voie publique. »
Toujours pas de solution, mais on touche à quelque chose. La piste est perçue comme une punition par Aly Diouara. Après quelques recherches, il s’avère qu’il s’agit de l’un des cofondateurs de ce « collectif des usagers de la voie publique » ayant initié cette pétition intitulée…
Aly Diouara Amine Saha
Aly Diouara n’est pas un inconnu. Il est intervenu sur BFM le 28 mai et dans Le Parisien, défendant l’idée que ces aménagements cyclables sont inutiles. Il était d’ailleurs accompagné d’Amine Saha, qui n’est pas intervenu lors de cette occasion mais a pris la parole lors du premier reportage sur TF1 le 27 mai.
Il semble donc que cette actualité ait été poussée par les deux protagonistes dans le but de résoudre un problème initialement personnel, à savoir l’utilisation de leur voiture pour se rendre au travail.
D’après les informations que j’ai trouvées en ligne, Aly Diouara, habitant au niveau de la cité des 4000, doit se rendre à son travail au Centre de Ressources Assistives de Transi à côté de la mairie de Drancy. Ce trajet de 6,3 km passe le long de cet aménagement cyclable, ce qui le concerne directement en raison de la congestion à cet endroit. Dommage qu’il ne se réjouisse pas des nouveaux aménagements qui lui permettraient de faire le même trajet à vélo.
J’ai donc pris le temps de discuter avec lui sur Twitter pour chercher à mieux connaître ses motivations et solutions, mais malheureusement, je n’ai eu droit qu’à de la langue de bois et un « Ok Armstrong ».
Un mépris pour le vélo non dissimulé qu’il considère comme un loisir pour les bobos sportifs plutôt qu’une solution pour tous, notamment pour ceux qui ne peuvent pas se payer un abonnement de transport en commun ou une voiture. Les « sans-dents », comme il les appelle…
Surtout en ce moment, avec les étudiants qui galèrent à trouver un logement sur Paris et sont obligés de s’installer en petite couronne, sans oublier l’approche des JO et l’explosion du prix des transports.
En comparaison avec d’autres modes de transport, le vélo reste le plus abordable, surtout si l’on opte pour la location. Il est aussi possible d’acheter un vélo neuf ou d’occasion avec des aides de l’État, ou d’en louer un en bénéficiant d’une aide à la mobilité. Quand je vois Aly Diouara dire qu’un vélo coûte 6000€, soit c’est vraiment être de mauvaise foi, soit c’est être complètement déconnecté de la réalité.
Et encore faut-il que ce choix soit motivé par des aménagements sécurisés, et c’est justement le rôle de cette piste.
https://www.instagram.com/reel/C7tEP4-CT4K/?igsh=bGo0d21uc2Y3c3Rs
Et les cyclistes, qu’en pensent-ils ?
Le cycliste présent dans la vidéo de TF1 m’avait contacté sur Twitter, et j’ai pu le rejoindre pour que nous fassions son trajet ensemble. Il m’a partagé des informations très intéressantes, comme la raison pour laquelle il s’est mis au vélo. C’était bien avant la mise en place de ces aménagements cyclables, suite à de nombreux retards du tram qui le conduit à son travail.
En observant l’intersection sur cet axe problématique, on constate que les véhicules stationnent dans l’intersection, ce qui, rappelons-le, est interdit. Pour leur défense, la traversée de cette intersection se fait en biais sur une distance très longue et difficile à anticiper. C’est une situation plutôt commune. Le tram rencontre les mêmes scènes à Paris.
Idéalement, il faudrait réduire la largeur des voies au niveau de l’intersection, créer des zones d’attente avant le tram et assurer des continuités cyclables. Car pour le moment, rien n’est prévu pour leur traversée, même si soi-disant ce sont les aménagements cyclables qui créent cette congestion ici.
Voilà pour notre premier cycliste qui s’est donc retrouvé malgré lui sur un vélo, fuyant les retards du tram provoqués par les bouchons.
Le témoignage d’une autre cycliste
J’ai également pu interviewer l’autre cycliste présente dans le reportage de BFM. Oui, le monde est petit ! Cet aménagement est une bouffée d’air pour elle et lui permet de faire ses déplacements quotidiens en sécurité. Car même les retraités ont le droit d’utiliser le vélo.
Maintenant que ces visions sont partagées, regardons les différents problèmes soulevés.
Le plus ennuyeux, c’est les TRANSPORTS D’URGENCE. Dans la vidéo, il est montré que l’aménagement cyclable bloque leur passage.
Le lieu de cette vidéo est juste en face du commissariat de police. Ici en particulier, de nombreux mauvais stationnements m’ont été signalés par la police elle-même.
Voici un exemple récent qui m’a été partagé par un cycliste, et sur Google Street View, on peut également en voir des traces. C’est quasiment systématique.
Ces stationnements bloquant la circulation mettent en danger les cyclistes, et je trouve dommage que la vidéo ne dure que quelques secondes et ne montre pas ce que cache le camion blanc qui s’est déplacé…
Pour revenir à la piste, elle n’empêche pas les véhicules d’urgence d’y circuler. Elle est équipée de balises auto-relevantes qui permettent justement l’accès des véhicules de secours en cas de problème. Le vrai problème, ce sont les mauvais stationnements sur cet aménagement, et le communiqué souligne cet élément. Il faut rester cohérent dans votre communication : si les véhicules motorisés peuvent utiliser cette piste, alors les transports d’urgence le peuvent aussi.
Pour aller plus loin, faisons le parallèle avec Paris qui a vu une mise en place massive d’aménagements cyclables. Le délai d’intervention des pompiers ne s’est pas allongé en raison de ces aménagements. Au contraire, c’est la première fois depuis des années que ce temps a diminué, passant d’un délai oscillant entre 7 minutes 10 secondes et 7 minutes 49 secondes en 2015, à un temps de 6 minutes 9 secondes à 6 minutes 15 secondes récemment.
Si ces aménagements sont suffisamment sécurisés et non bloqués par de mauvais stationnements, ils sont au contraire une excellente solution pour fluidifier les interventions.
Le délai moyen d’intervention des engins de la BSPP oscillait entre 7 minutes 10 secondes et 7 minutes 46 secondes pendant plusieurs années jusqu’à la pandémie mondiale du Covid-19. Là, dans un contexte sanitaire inédit, ce même délai a explosé, atteignant 8 minutes 48 secondes. Avant de largement diminuer, passant sous la barre des sept minutes en 2021 (6 minutes 9 secondes) et 2022 (6 minutes 15 secondes).
Pour revenir au stationnement des camions, l’aménagement cyclable est un vrai problème, mais il n’a jamais été autorisé de stationner sur cette voie de circulation. Il existe des solutions de stationnement pour les livraisons dans certaines rues perpendiculaires, ce qui pourrait être développé pour simplifier le travail des livreurs.
Finalement, reste le problème de la congestion des véhicules motorisés. C’est en partie vrai, surtout du côté sud où cela crée un pincement et bloque la sortie de l’A86. De l’autre côté, la congestion est liée aux feux de signalisation, ce qui n’est pas mis en avant dans le reportage. La congestion a finalement toujours été présente ici, car il faut à un moment ou un autre couper le tram pour rejoindre l’A86.
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https://www.facebook.com/aly.diouara.3/videos/1406156250077372
https://twitter.com/messages/166898051-1660645074/media/1796845110937756126
Et donc, y a-t-il des solutions pour régler ce problème de congestion ?
D’un point de vue très local, la première approche est de supprimer les aménagements cyclables là où ils gênent. C’est d’ailleurs ce qui a été choisi ici, notamment entre la liaison de l’A86 et la nationale. La piste est soudainement supprimée. À première vue, cela fait un mois que c’est comme ça. Le marquage n’est pas encore complètement effacé, la piste cyclable sur le trottoir n’est pas claire, et quant à la liaison au niveau de l’intersection… c’est quoi cette blague !
Pour l’autre côté de la chaussée, il pourrait aussi être possible de créer une circulation sur le trottoir en reprenant le même principe, mais cela entraînerait de gros travaux, notamment au niveau de la liaison avec la N186.
Cette solution semble satisfaire les usagers de la voiture, mais pour les piétons, les cyclistes et les usagers des transports en commun, ce n’est pas vraiment une solution, juste un retour à l’enfer que c’était de circuler ici avant.
Mais il existe une autre solution absolument pas abordée pour réduire cette congestion, en finir avec les bouchons dans cette zone et même permettre de conserver la piste cyclable !
Cette solution, c’est de supprimer cette bretelle de l’autoroute A86. Si on prend un peu de hauteur, on peut voir qu’il existe ici trois nœuds en trois kilomètres. Ce nœud pose problème car il ne débouche pas, comme ses voisins, sur un carrefour à sens giratoire mais sur un feu, impactant grandement la circulation.
Cela reporterait donc la circulation de transit sur un axe plus adapté, l’autoroute ! Cela n’impactent pas la circulation. Cette solution était déjà proposée pour faire la cité de 4000 – mairie de Drancy. Comparé à l’adaptation du trottoir pour en faire un aménagement cyclable avec des abaissements de chaussée et des liaisons cyclables, le coût de cette solution est quasiment nul, nécessitant seulement la mise en place de barrières pour couper le transit sur l’accès et la sortie.
La fermeture d’une bretelle d’autoroute peut sembler impossible, mais Montreuil, non loin de là, en a récemment fait la démonstration avec la fermeture de l’A186, requalifiée en boulevard urbain avec mise en place de transports en commun et de voies cyclables à la place d’une voie exclusivement réservée aux véhicules motorisés.
conclusion
C’est aussi ça une solution qui offre plus d’alternatives que de supprimer des possibilités de déplacement. Avec ce type de solution, c’est au final moins de congestion, moins de gêne au niveau du tram, et une possibilité de plus pour se déplacer à vélo.
Car chaque fois que l’aménagement est manquant, cela crée instantanément du mauvais stationnement et des points noirs. Pointer du doigt un aménagement en indiquant qu’il est vide et en faisant tout pour le supprimer n’encourage pas non plus cette démarche.
En visitant les lieux, j’ai constaté que cet aménagement cyclable ne garantit pas encore une sécurité suffisante pour les usagers. Il y a des améliorations, mais il reste de nombreux travaux à faire et certaines zones ne sont pas protégées. Par exemple, il y a des endroits où la piste est juste marquée par de la peinture, ce qui est insuffisant pour protéger les cyclistes.
Cet effort du département est à saluer et permettra justement d’encourager le développement du vélo.
En conclusion, pour une concertation, « On ne justifie pas la construction d’un pont en comptant le nombre de personnes qui traversent la rivière à la nage. » Bien sûr, tant qu’il n’y aura pas d’aménagements, il n’y aura pas de cyclistes et donc les pistes ne serviront à rien. C’est le serpent qui se mord la queue.
Le vélo est une solution de transport viable et essentielle, surtout pour les plus démunis. Il est donc crucial de continuer à développer ces infrastructures avec soin et concertation.
Merci pour votre attention, n’hésitez pas à me partager vos retours et idées.